
Pavillon de chasse de Guelendjik, le dimanche 24 mai 2026
« Beaubienov ! Quelle bonne idée que cette visite dominicale. Entrez donc, je vais vous faire une tasse de thé.
– Pas trop fort le thé, président… »
Vu mes résultats cette saison, mieux vaut rester prudent. Les décoctions du président, quand il est froissé, sont célèbres de Londres à Vladivostok. Rares sont ceux qui y ont goûté qui ont pu en témoigner après coup.
« Je suis venu vous dire au revoir président.
– Vous partez déjà ?
– Oui, le devoir m’appelle… Je ne crois pas avoir encore quelque chose à prouver au Torpedo, il est temps de céder les rênes à un autre. Je suis fier du travail effectué, les finances sont saines, l’équipe est belle, la réputation est en hausse. Que demander de mieux ?
– Je vous l’accorde, vous avez fait du bon travail. Je reste cependant persuadé que, sans vous, le club ne franchira pas le palier supérieur… Mais je respecte votre décision. Alors, où allez-vous maintenant ?
– Je ne sais pas encore… l’Allemagne peut-être… Pourquoi pas Dresde…
– Aaahhh Dresde, ma jeunesse ça ! Saviez-vous que j’y avais été posté dans les années 80 ? J’aurais voulu aller à l’Ouest, mais mon style était trop soviétique il paraît.
– Mais alors, vous avez connu les Allemandes, osais-je avec un clin d’œil complice.
– J’étais un homme marié déjà Beaubienov, père de famille. Puis, les Allemandes de l’Est de l’époque n’avaient pas grand-chose en commun avec vos… « amies » actuelles. Pensez aux images de ces lanceuses de poids est-allemandes aux J.O. de Montréal… »
Le président me tint des heures avec ses souvenirs, les brasseries qu’il visitait, où il restait des heures à lire en buvant de la bière. Les Allemandes rencontrées, la surveillance des dissidents, la Stasi…
« J’avais un petit appartement de fonction au 6e étage. Et pas d’ascenseur évidemment. Pauvre Lioudmila, enceinte, qui devait monter le moïse de Maria par les escaliers. Nous n’étions pas riches, loin de là, et nous économisions pour nous acheter une petite Lada, ou une Trabant, ce qui représentait un luxe à l’époque. Même moi, pourtant parmi les gens bien placés dans l’administration, je devais couper un kopek en deux pour espérer avoir une automobile un jour… La vie était rude pour nous à l’époque, mais nous étions jeunes… »
Le président continue, inlassablement :
« J’avais 32 ans quand je suis arrivé à Dresde comme agent du KGB, en 1985. Officiellement, nous épiions les faits et gestes des dissidents pour les envoyer dans une des 50 cellules du QG de la Stasi où ils étaient interrogés. Par souci de sécurité, nous avions des noms de code. Seule la première lettre de notre nom était conservée. On m’appelait Officier Platov. Ah là là, tout cela ne me rajeunit pas… »
Le regard du président, tourné vers le mur, semblait se perdre dans ses souvenirs…
« Le quartier où je vivais était un quartier de hauts fonctionnaires. Notre travail n’était pas des plus palpitants, alors nous écumions souvent les brasseries. J’ai pris 12 kilos à Dresde. Lioudmila me faisait des scènes bien souvent, quand je rentrais à quatre pattes… Je me demande si toutes ces brasseries figurent dans l’itinéraire touristique qui s’appelle « Dans les pas de Vladimir Poutine » tiens. Car je suis une vedette moi aussi vous savez. J’aimerais bien vous servir de guide, même si les lieux ont bien changé aujourd’hui, ce sera malheureusement impossible. Figurez-vous que j’ai vécu la chute du mur de Dresde. Quelle ambiance, quelle folie, quelle incertitude ! Vous vous doutez bien qu’un officier du KGB est rapidement devenu un suspect. En 1990, j’étais de retour à Leningrad, où je suis devenu, entre autres, professeur à l’université. Du fait de mon rang et de ma provenance, mes élèves m’ont surnommé Stasi, du nom de la police est-allemande.
– Quelle vie passionnante vous avez eue, président…
– Ne vous y trompez pas : en RDA, je n’étais qu’un sous-fifre. Les grands projets sont arrivés ensuite, grâce à Anatoly Sobtchak, le maire de Saint-Pétersbourg. J’étais son adjoint, et en tant qu’adjoint je prenais le contrôle de la ville en son absence. Et comme Sobtchak aimait voyager… Il faut savoir attendre son heure Beaubienov ! »
FIN DE SAISON 2025/2026
Une année de vache maigre… Nous n’avons finalement remporté aucun titre. Nous étions trop loin pour rattraper les ténors en championnat, nous avons chuté en demi-finale de la coupe de Russie au Spartak, et la coupe d’Europe vous savez : un huitième de finale de l’Europa League après avoir été repêché des groupes de la Ligue des Champions.
Au moment de reprendre ce récit, nous sommes 5e au classement à six rencontres de la fin et toujours en lice en coupe, où un derby au Spartak nous attend en guise de demi-finale.
Le détail de tout cela :
RPL 25 : Ufa – Torpedo
À 4 jours du choc face au Spartak, je fais tourner, ce qui a pour conséquence de nous coûter deux points. À noter le magnifique coup-franc de Jankauskas pour l’égalisation.
Kubok, demi-finale : Spartak – Torpedo
Les titulaires sont là, sauf notre charnière centrale : Diveev s’est légèrement blessé et Mironov est suspendu. Dans de telles conditions, pas de miracle : sans notre Rideau de Fer, nous n’avons pas fait le poids, malgré un bon Zlobin entre les perches.
Ce n’est pas notre année…
RPL 26 : Torpedo – Ural
Avec la réception de l’équipe de Katyushaburg, nous renouons avec le succès. Nous nous mettons rapidement à l’abri puis gérons sereinement notre belle avance.
RPL 27 : Torpedo – Zenit
Il nous fallait une victoire aujourd’hui pour encore espérer au titre, nous n’avons pas fait mieux qu’un nul. Pourtant, nous avons largement dominé… Cette fois c’est bien fini…
RPL 28 : Torpedo – Arsenal Tula
Quelques changements dus à la fatigue. Comme contre le Zenit, nous dominons largement tout en faisant preuve de maladresse en zone de conclusion. Au moins, cette fois, il y en a une qui rentre sur phase arrêtée. Nous sommes vraiment à la peine offensivement.
RPL 29 : Krasnodar – Torpedo
Nous étions mathématiquement éliminés de la course au titre à l’entame de cette rencontre. Jouer Krasnodar et le Dynamo pour finir, quel symbole.
Nous avons brillamment réagi après un début difficile, revenant de 2-0 au quart d’heure à 2-2 au repos. La seconde mi-temps permettra aux locaux de prendre de nouveau deux buts d’avance, sans être rattrapés cette fois. Le cœur n’y était plus.
RPL 30 : Torpedo – Dynamo
Après Krasnodar, le Dynamo. Je termine mon œuvre au Torpedo face aux deux autres clubs russes que j’ai entraînés auparavant, ou demain, dans un autre continuum espace-temps. Le Dynamo, en cas de victoire, s’adjuge le titre, eux ne sont pas là pour rigoler.
Au final, nous leur avons bien fait peur. Jusqu’à la 82e, ils étaient deuxièmes. Leur but a tout changé, et de toute façon le Zenit, qui devait gagner en cas de non-victoire du Dynamo, s’est fait rattraper au CSKA à la 88e.
Le classement final
Nous terminons 5e, tout juste qualifiés pour l’Europa Conference League.
Les stats des joueurs
Les récompenses
Le mot du coach
Sept saisons, sept années passées dans le petit stade du Torpedo prennent fin.
Après une montée surprise dès la première année, le Torpedo a sué pour se faire une place parmi les meilleurs de la RPL. Il a fallu trois saisons assez insipides pour finalement parvenir à aligner deux titres de champions d’affilée ! Si on ajoute une Supercoupe, vous tenez les trois titres glanés par les Tchiorno-Belye sous mes ordres.
Cette aventure a été nettement plus difficile que mes deux précédents passages en Russie. Le Dynamo était en FNL quand j’en ai pris le contrôle en 2016. Cependant, contrairement au Torpedo qui venait de monter de Division 2 Régionale, le Dynamo venait de descendre de RPL. Les moyens et l’effectif étaient d’un tout autre ordre. Quant à Krasnodar en 2017, le club possédait des infrastructures dignes des meilleurs clubs mondiaux, et des moyens gargantuesques. Pas étonnant que des joyaux soient sortis de son centre de formation.
Au Torpedo, je suis arrivé avec de petits moyens à faire de grandes choses. Encore maintenant, en 2026, il reste difficile de renforcer l’équipe : les infrastructures soviétiques n’incitent guère les grands noms à se risquer au club. De plus la réputation n’a rien de comparable avec les Spartak et le Zenit.
Cette aventure fut passionnante mais plus frustrante que mes deux dernières expériences. Je me suis battu pour tenter d’améliorer les infrastructures, mais les projets ont été annulés plusieurs fois faute de moyens. La formation ne suivant pas vraiment, il fallait se tourner vers les transferts… pour ne trouver que des joueurs intéressés assez moyens ou alors trop chers.
Bref, une belle expérience. Au moins, le but fut atteint : aligner un Onze d’anthologie, de jeunes femmes enlatexées et généreuses ! Cet objectif-là, je le remplis toujours !
L’armoire à trophées
Deux titres de champions de Russie et une Supercoupe. Deux présences remarquées en Europe aussi : deux fois dans les groupes de la Ligue des Champions, dont une fois repêché pour l’Europa League pour atteindre le second tour à élimination directe.
La RPL :
LE ONZE DU TORPEDO
Je ne pouvais quitter le club sans présenter mon Onze.
Gardien de but : Ivan Zlobin
Saisons : 4
Matchs de championnat : 117
Buts encaissés : 95
Sélections : 4
Acheté au Zenit pour ₽80M, nous avons donné la chance à leur remplaçant de devenir un titulaire incontournable, à tel point que la Sbornaya a fait appel à lui à 4 reprises. Un des meilleurs gardiens qu’il m’a été donné d’entraîner. Très peu d’erreur, une bonne relance, des arrêts importants. Un excellent gardien qui restera sur ma liste des joueurs intéressants.
Défenseur droit : Evaldas Jankauskas
Saisons : 5
Matchs de championnat : 81
Buts marqués : 3
Sélections : 10 (U21)
Recruté tout jeune d’un club de D2 Régionale pour seulement ₽12M, il s’est imposé rapidement comme un bon arrière droit. J’aime dénicher de bons joueurs de petits clubs. Solide physiquement, il reste un peu juste quand il s’agit de prendre part au jeu offensif. Pour preuve ses 8 passes décisives en 81 matchs. Qu’importe, il a marqué le club de son empreinte, malgré son jeune âge.
Défenseur gauche : Elmir Nabiullin
Saisons : 4,5
Matchs de championnat : 94
Buts marqués : 2
Sélections : 1
J’ai hésité entre lui et deux autres : Skopintsev et Kichin. J’ai opté pour celui qui a joué le plus en RPL. Nabiullin peut faire des miracles ou être invisible. Un bon arrière gauche, sans plus, mais qui nous a quand même conduit à deux titres.
Défenseur central : Leonid Mironov
Saisons : 5
Matchs de championnat : 140
Buts marqués : 10
Sélections : 3
Acheté au Spartak pour ₽160M, une grosse somme pour le Torpedo il y a 5 ans, il est estimé à près du triple aujourd’hui, et j’ai décliné des offres bien plus grosses pour lui. Devenu capitaine jeune, c’est notre tour de contrôle derrière.
Défenseur central : Sergey Bozhin
Saisons : 7
Matchs de championnat : 115
Buts marqués : 6
Sélections : 0
Arrivé en même temps que moi au club, je l’ai conservé tout le long. Polyvalent et répondant toujours présent quand j’ai dû faire appel à lui, Bozhin méritait sa place dans mon Onze. Les joueurs des débuts ne sont pas moins importants que les joueurs, plus doués, de la fin. Mon premier capitaine, il a participé à la montée, aux vaches maigres, a perdu sa place de titulaire et son brassard sans jamais se plaindre. Un exemple de professionnalisme.
Milieu central, MJR : Levan Gvalia
Saisons : 3,5
Matchs de championnat : 72
Buts marqués : 3
Sélections : 29 (Géorgie)
Plusieurs joueurs se sont succédé au poste de MC, je suis donc allé avec un qui a beaucoup compté lors de la période des vaches maigres. Le jeune Géorgien est arrivé en fin de contrat à Dortmund avec un talent fou, sans jamais réellement progresser autant que je l’espérais. Nos infrastructures très moyennes nous ont pénalisés plus d’une fois. Nous l’avons finalement revendu pour ₽210M au Dinamo Tbilissi.
Milieu central, Mezzala : Astemir Gordyushenko
Saisons : 7
Matchs de championnat : 187
Buts marqués : 25
Sélections : 0
Autre joueur arrivé en même temps que moi, lui m’a accompagné tout le long en tant que titulaire. Un joueur régulier, complet et capable de marquer. Cette saison encore, il a cumulé 4 récompenses de HM.
Respect pour ces joueurs qui me suivent aussi longtemps et traversent toutes les tempêtes à mes côtés.
Milieu central, MJA : Dzenis Burnic
Saisons : 5
Matchs de championnat : 129
Buts marqués : 4
Sélections : 20 (Bosnie)
Totalement incontournable. Un grand meneur de jeu qui a si souvent dénoué des rencontres serrées. 15 HM, 20 passes et une note moyenne totale de 7.24. Le tout comprenant sa première saison ratée au club. Seule ombre au tableau : son endurance… Un tout grand meneur de jeu que je retiendrai aussi pour le futur, comme le gardien Zlobin.
Milieu offensif droit, Att. Int. : Maxim Glushenkov
Saisons : 3
Matchs de championnat : 71
Buts marqués : 23
Sélections : 8
Glushenkov fut le premier gros transfert du club, recruté pour un montant de ₽300M à l’été 2021, en provenance du Spartak. D’abord essayé en tant qu’attaquant de pointe, il s’est rapidement avéré meilleur comme attaquant intérieur droit. Assez irrégulier malheureusement, au gros salaire, j’ai préféré le laisser partir vers Brentford après trois saisons au club.
Milieu offensif gauche, Att. Int. : Dmitry Markitesov
Saisons : 4
Matchs de championnat : 94
Buts marqués : 23
Sélections : 8 (U21)
Recruté du Spartak pour une bouchée de pain (₽23M), Markitesov s’est solidement imposé dans le Onze au point de pousser Kristijan Lovric vers la sortie. Excellente surprise que ce joueur qui a souvent marqué des buts importants. Comme beaucoup de Russes cependant, son irrégularité lui ferme les portes des plus grands clubs.
Avant-centre, Att. Avancé : Cícero Marcos
Saisons : 3,5
Matchs de championnat : 71
Buts marqués : 29
Sélections : 13 (Brésil U20)
D’abord en prêt une saison, il a accepté de rejoindre le club pour de bon six mois après la fin de son premier passage. Jeune et talentueux, il a marqué de bien jolis buts, mais a lui aussi péché par irrégularité. Une caractéristique des Tchiorno-Belye apparemment.
Voilà qui clôture notre Onze des sept dernières saisons… Mais j’aurais aussi pu ajouter des joueurs tels que :
Igor Diveev, 44 apparitions
Luis Rodas, 36 apparitions
Kristijan Lovric, 50 apparitions
Pascal Stenzel, 37 apparitions
Javier Cáceres, 39 apparitions
Valery Kichin, 71 apparitions
Finances
Je laisse un club en excellente santé financière, avec un solde de plus de ₽3Mrd (environ €45M).
Les au revoir
« Cette fois, c’est vrai, vous partez.
– Oui, Monsieur le président.
– Vous allez où alors ? À Dresde ?
– Oui, probablement, mais pas tout de suite.
– Pour y faire quoi ?
– Vous connaissez mon goût pour les clubs mythiques du siècle passé. Après le Torpedo, pourquoi pas le Dynamo Dresde ?
– Le Dynamo Dresde ? Quelle magnifique idée ! Le club va mal depuis sa descente en D3 en 2020 mais avec un homme comme vous, tout est possible ! Il y a du travail si vous décidez de relever ce défi.
– Le travail ne me fait pas peur, vous me connaissez. Mais avant tout, des vacances !
– À quelle heure est votre avion au fait ? Voulez-vous que je demande à mon chauffeur de vous conduire à l’aéroport ?
– Non, merci président, j’ai ma voiture. »
La nuit est maintenant tombée, le silence est lourd, pesant, assourdissant. Le président est visiblement ému de me voir partir.
Je tends la main, et d’une voix chaude :
« Au revoir, Vladimir.
– Au revoir Mark, faites attention à vous.
– Vous aussi Vladimir. Je reviendrai vous voir, c’est promis, mais pas tout de suite. Si on se donnait rendez-vous dans trois ans, ici, à Guelendjik, qu’en dites-vous ?
– Trois ans ? Vous partez sur Mars ?
– Non, mais presque… Je repasse dans trois ans président. »
À suivre, après le Onze des joueurs, il reste encore la présentation du PODIUM DES NYMPHETTES de la story et mon retour, trois ans plus tard, à Guelendjik…!