Cozumel, mai 2017
Bella et moi, au paradis, Ă Cozumel, rappelez-vous⊠Le bon vieux tempsâŠ

HĂ© Oui ! Une fois nâest pas coutume, je vais commencer mon rĂ©cit Ă la fin dâun autre. Les dates coĂŻncident, le pays coĂŻncide, tout se suit, câĂ©tait Ă©crit.
Cozumel, Mai 2020
Cette fois, je loge en ville, à San Miguel de Cozumel, sur la luxuriante ßle au large de la péninsule du Yucatan, face à la ville de Playa del Carmen.
Loin de lâanimation touristique de CancĂșn, loin des Tout-inclus, ou des tout-permis plutĂŽt, qui foisonnent tout au long de la Riviera Maya. Loin de ces touristes russes, amĂ©ricains, canadiens, sud-amĂ©ricains et français, sans oublier les QuĂ©bĂ©cois, quâon croise un peu partout dans ces lieux de villĂ©giature pour retraitĂ©s aisĂ©s ou pour jeunes universitaires imbibĂ©s, ou tout simplement pour la classe moyenne qui a accumulĂ© les pires privations pour sâoffrir une semaine dans un trompe-lâĆil paradisiaque⊠Une semaine Ă se prendre pour des kings en salopant tout, buvant trop, bĂąfrant Ă volontĂ© et prenant de braves et honnĂȘtes travailleurs pauvres pour de vils larbins.
Ă la lumiĂšre de cette dĂ©mesure, on est en droit de se demander si le Monde ne court pas Ă sa perte. Câest Ă se demander ce qui enraiera cette descente aux enfers⊠Une pandĂ©mie peut-ĂȘtre ? Ben non, je divague, cela nâexiste plus ces choses-lĂ , nous ne sommes plus au Moyen-Ăge !
Cozumel reste sauvage, belle, mĂȘme si le tourisme de masse semble aussi vouloir sây implanter. Un tourisme plus select, certes, mais le respect ne va pas de pair avec la grosseur du portefeuille⊠Câest en tout cas le lieu que jâai choisi pour me recueillir, pour penser, pour panser mes plaies. Plaies bĂ©antes laissĂ©es par BellaâŠ
AprĂšs avoir menĂ© lâAtlante CancĂșn Ă la victoire en Apertura 2017/18 de lâAscenso, jâavais dĂ©cidĂ© â enfin Bella avait dĂ©cidĂ© â de rejoindre la CitĂ© des Anges et la MLS pour y coacher lâĂ©quipe dâexpansion 2018 : le LAFC. Deux annĂ©es passĂ©es Ă la barre du club californien, avec Ă la clĂ© une victoire en saison rĂ©guliĂšre et une victoire en Playoffs Ă lâOuest en 2019 ainsi quâune MLS Cup perdue face au Red Bulls de New York la mĂȘme annĂ©e. LâĂ©quipe se mettait en place, tout allait bien, mais le dĂ©part de Bella pour lâAllemagne allait me prĂ©cipiter dans un Ă©tat de dĂ©tresse qui me força Ă dĂ©missionner.
Des semaines avaient passĂ©. Jâallais mieux. Les bouteilles de tequila avalĂ©es pour noyer mon chagrin Ă©taient maintenant digĂ©rĂ©es. Je retrouvais la forme, le goĂ»t de vivre, au contact des jolies Mexicaines tout Ă©moustillĂ©es par mon statut de vedette dans la rĂ©gion. Mais si cela impressionnait les señoritas, cela ne semblait pas impressionner les dirigeants des clubs de Football malheureusement.
Et pourtant, le temps Ă©tait venu de sortir de ma retraite, de ma lĂ©thargie. Ă tout hasard, jâavais recontactĂ© il y a quelques jours mon ami Eduardo Braun Burillo, lâancien prĂ©sident de lâAtlante CancĂșn. Je lui avais offert un titre, insuffisant pour accĂ©der Ă la Liga MX, mais un titre quand mĂȘme.
Par chance, il nâavait pas changĂ© de numĂ©ro de cellulaire.
Il mâapprit, sans surprise, quâavec le dĂ©mĂ©nagement de lâAtlante Ă Mexico City, il avait quittĂ© le monde du ballon rond. Il Ă©tait revenu Ă ses premiĂšres amours, câest-Ă -dire le nightlife dans la capitale de la luxure, la Babylone des CaraĂŻbes : CancĂșn.
« Bien sĂ»r que je vais tâaider, cabron, je vais appeler TĂo Alejandro et voir ce que je peux faire. Et quand tu passeras dans le coin, viens me voir. Tu verras, je suis certain que tu aimeras mes nouveaux Ă©tablissements. Il y a pour tous les goĂ»ts : touristes, richards du coin, Français⊠et mĂȘme pour les pervers dans ton genre ! »
TĂo Alejandro, câest Alejandro Burillo AzcĂĄrranga, lâoncle dâEduardo, câĂ©tait lui le vrai boss de lâAtlante. Enfin, du temps oĂč lâAtlante rĂ©sidait Ă CancĂșn. Señor AzcĂĄrranga, comme jâaime lâappeler, est un richissime homme dâaffaires mexicain, qui a fait fortune dans la tĂ©lĂ©phonie et lâhĂŽtellerie, pour ensuite se diversifier dans le sport, Football et Tennis essentiellement. Il fait partie dâun famille trĂšs cĂ©lĂšbre au Mexique, une famille milliardaire qui Ćuvre dans toutes les sphĂšres de la sociĂ©tĂ©.
Sâil nâapprĂ©ciait guĂšre son neveu fainĂ©ant, il mâavait Ă la bonne, ainsi que Bella. Il avait dâailleurs Ă©tĂ© trĂšs peinĂ© lors de mon dĂ©part prĂ©cipitĂ© pour L.A. il y a deux ans et demi. Jâai cependant vite compris quâen plus de ne pas mâavoir oubliĂ©, il mâavait pardonnĂ© puisque quelques jours plus tard mon tĂ©lĂ©phone sonna.
« ¿ Señor Beaubien, cómo estås ?
â Señor AzcĂĄrraga, estoy bien. Âż Y usted ?
â Muy bien. »
Les civilités passées, nous sommes entrés dans le vif du sujet.
« Jâai eu un appel de mon borracho de neveu qui mâa expliquĂ© que vous Ă©tiez Ă la recherche dâun nouveau dĂ©fi, est-ce vrai ?
â Si, Señor AzcĂĄrraga.
â Jâai un de mes amis qui cherche quelquâun qui a votre profil. Ce nâest pas un proche. Câest mĂȘme plutĂŽt un concurrent de ma famille, mais nous nous entendons bien. Peut-ĂȘtre le connaissez-vous : Ricardo Salinas.
â LE Ricardo Salinas ?
â Ăvidemment. Je ne vous parle pas du marchand de glaces du coin de la rue, mais du prĂ©sident du Grupo Salinas. »
Ricardo SalinasâŠ
⊠la troisiĂšme fortune du Mexique, le fondateur de TV Azteca. Il avait soulevĂ© un vĂ©ritable scandale le 6 mai 2012, en diffusant sur les ondes un quart de finale de Liguilla en mĂȘme temps que le dĂ©bat prĂ©sidentiel Ă la veille des Ă©lections. En avance sur Trump de quelques annĂ©es, il avait alors postĂ© sur Twitter :
« Si vous voulez voir le dĂ©bat, regardez-le sur Televisa ; sinon regardez le match sur TV Azteca. Je vous donnerai les cĂŽtes dâĂ©coute le jour suivant. »
« Je suis certain que vous le connaissez, au moins de nom, continua Señor AzcĂĄrranga. Il est certes un concurrent de ma famille, mais moi jâai retirĂ© mes billes de Televisa il y a 20 ans, alors⊠Ăh bien ! figurez-vous quâil va faire dĂ©mĂ©nager son Ă©quipe, les Morelia Monarcas, Ă MazatlĂ n.
â Ah oui ? Câest donc officiel, câest Morelia qui dĂ©mĂ©nage ?
â Non, pas du tout. Lâannonce sera faite bientĂŽt, et en attendant câest un secret. Un secret de polichinelle, certes, mais un secret quand mĂȘme. Jâaime autant vous prĂ©venir : si vous deviez vendre la mĂšche, je ne donnerais pas cher de votre peau, surtout dans ce pays. LĂ oĂč cela devient intĂ©ressant, câest que Salinas mâa confiĂ© quâil cherchait un crack pour mener Ă bien le dĂ©mĂ©nagement. Ce ne sera pas facile : les supporters de Morelia seront fous furieux ! Plusieurs joueurs sont partis, dâautres utiliseront ce prĂ©texte pour les suivre. Bref, cela ressemble Ă une Ă©quipe dâexpansion de MLS, vous ne trouvez pas ?
â Si, un peu.
â Alors jâai parlĂ© de vous Ă mon ami Salinas, et il veut vous rencontrer. »
Nous avons ensuite parlĂ© de nous, et du malheur qui avait accablĂ© sa famille quelques mois plus tĂŽt. Son frĂšre, le fondateur et prĂ©sident de la chaĂźne Televisa, avait accidentellement tuĂ© son fils de 11 ans avec son bateau. Un accident, sauf que lâhomme avait beaucoup bu⊠et fut arrĂȘtĂ© par la police de San Fransisco oĂč lâaccident eut lieu. MoralitĂ© : lâargent nâachĂšte pas tout, et il ne suffit pas Ă faire le bonheurâŠ
Señor AzcĂĄrraga fut aussi trĂšs peinĂ© dâapprendre que Bella avait regagnĂ© lâAllemagne.
« Quel dommage. Une si charmante enfant. Mais je suis certain que vous trouverez une belle Mexicaine Ă MazatlĂĄn. La ville nâa rien Ă envier Ă CancĂșn vous savez. Elle est plus authentique, moins carton-pĂąte, moins Las Vegas. »
Câest ainsi que jâai obtenu, par lâintermĂ©diaire dâEduardo et de TĂo Alejandro, une entrevue avec Ricardo Salinas Ă MazatlĂĄn.
Ă partie de lĂ , tout alla vite, trĂšs vite. Le 2 juin, le dĂ©mĂ©nagement Ă©tait officialisĂ©, le 8 je fus nommĂ© entraĂźneur de MazatlĂĄn, lâannonce officielle Ă©tant faite lors de la cĂ©rĂ©monie pour la prĂ©sentation des couleurs du club. Entretemps, le directeur technique, Mario Ruiz, nâavait guĂšre perdu de temps pour boucher les trous dans lâeffectif. Quand on a, Ă la tĂȘte du club, la 172e fortune du Monde, ça aideâŠ
Ă mon arrivĂ©e, lâĂ©quipe Ă©tait dĂ©jĂ bien fournie et le stade, le Kraken, quasi finalisĂ©âŠ
Le tout avait pris une semaine. Une semaine pour officialiser un projet mĂ»ri depuis 3 ans ! Car le stade a pris trois ans Ă ĂȘtre construit, et ne lâa pas Ă©tĂ© par hasard Ă©videmmentâŠ
Bella
Bella
Nostalgie⊠Il était temps pour moi de quitter Cozumel et les regrets et de paver la voie vers de nouvelles aventures !
