

@Sythax @Manthyz @Rhino Je savais que ça ferait mouche parmi les lecteurs comme malédiction !
@JeffZeze Ah ben si tu viens pendant que je suis à l’autre bout de la France aussi !

Voilà Noël est passé et je suis de retour dans mes pénates. Je ne suis pas très reposé mais comme on m’a offert du bon café, je me fais une bonne petite cure pour tromper la fatigue (et le manque d’alcool). Je suis donc prêt à vous poster la suite des aventures de Fernando, notre homme-piaf maudit par des dieux un peu chafouins. Mais comme j’ai le temps de bavarder, on va parler du joueur le plus légendaire du Vitesse, j’ai nommé Theo Bos.
Bon, il faut suivre le football néerlandais je pense pour le connaître car sa notoriété est surtout locale et il n’a pas beaucoup quitté les Pays-Bas dans sa carrière. Peut-être que les lecteurs belges en ont entendu parler (dites-le en commentaires !). Pour ma part, avant de me renseigner sur le Vitesse, je n’avais jamais entendu parler de lui.
Theo Bos naît en 1965 à Nijmegen d’une mère-fille de 18 ans dont la famille est catholique et d’un père marié à une autre femme et joueur du MVV Maastricht. Abandonné, il est adopté par la famille Bos et passe toute sa jeunesse à Arnhem, dans un quartier proche du stade du Vitesse, le Nieuw-Monnikenhuize. Grand fan du Vitesse, il en intégère les équipes jeunes en 1979 en tant qu’attaquant. Mais c’est repositionné en défense qu’il fait ses débuts en professionnel en 1983. Il a alors 17 ans et le Vitesse fait ses armes en Eerste Divisie.
Il ne quittera jamais le club en tant que joueur et est un des artisans qui a permis au Vitesse de monter en Eredivisie en 1989, de jouer la finale de la coupe nationale l’année suivante et de stabiliser le club dans le haut du panier de l’élite néerlandaise. Jusquen 2002, le Vitesse a toujours fini dans les places européennes et Theo Bos a ainsi pu se confronter aux meilleurs équipes du continent, telles que le Real Madrid, Parma ou le Sporting Portugal.
Il termine sa carrière de joueur le 25 mars 1998 alors que le Vitesse joue son tout premier match au Gelredome. Il part sur une belle victoire 4-1 contre Breda. Il a participé à 369 matchs pour les jaunes et noirs sur une période de 15 saisons pour 9 buts marqués et est sélectionné à 17 reprises avec les Oranges. Il a alors amplement mérité son surnom de Mister Vitesse, la récompense de sa fidélité. Chose amusante, à la suite du déménagement au Gelredome, le Nieuw-Monnikenhuize est détruit, des maisons sont bâties à la place et Theo Bos fait partie des acquéreurs d’un de ces logements. Lui qui a vécu quinze ans dans ce stade continue alors à y vivre malgré sa démollition.
Mais l’histoire d’amour ne se termine pas avec sa retraite sportive. Il intègre dans la foulée le staff du club et devient entraineur de jeunes jusqu’en 2000, puis entraineur adjoint jusqu’en 2003 et entraineur de la réserve jusqu’en 2005. C’est à cette date qu’il fait ses adieux au Vitesse pour aller entrainer le FC Den Bosch pendant quatre ans. Il n’arrive par à faire monter les Dragons en Eredivisie mais participe réuglièrement aux barrages de montée. Et dès que la place d’entraîneur est libre, il revient coacher son club de coeur. Nous sommes en 2009 mais la lune de miel durera un peu plus d’un an et demi avant que Merab Jordania le licencie juste après son rachat du club. Il aura eu quelques coups d’éclat avec notamment une belle victoire 4-1 contre l’Ajax.
C’est ainsi que finit son parcours au Vitesse. Il trouve ensuite refuge deux mois au Polonia Varsovie mais est licencié très rapidement. Il revient alors au pays pour coacher le FC Dordrecht pour la saison 2011-2012. On lui diagnostique alors un cancer du pancréas en janvier 2012 et il se voit obligé d’arrêter ses activités avant de démissionner de son poste en juillet pour se soigner.
Lors de sa dernière interview en décembre de la même année, il déclare « je vais me battre comme je l’ai toujours fait en tant que footballeur. Ce sera une bataille difficile mais je veux gagner ce match » ! Il continue alors d’assister aux matchs du Vitesse et de Dordrecht autant que la maladie lui permet. Il décède le 28 février 2013 à l’âge de 47 ans. Le week-end suivant, une minute de silence est respectée dans tous les stades en l’honneur de Mister Vitesse.
Les jaunes et noirs accueillent alors Utrecht au Gelredome. Theo Janssen, le capitaine, et Fred Rutten, l’entraîneur, portent un portrait en noir et blanc de Theo Bos et lui font faire un tour d’honneur avant de le déposer sur un chevalet dans un virage de la tribune à son nom. Les joueurs lui rendent alors hommage en y déposant une gerbe de fleurs. À la 4ème minute de jeu, le public se met à applaudir en l’honneur de l’ancien numéro 4 et l’arbitre, Bas Nijhuis, arrête le jeu pour que les joueurs rendent aussi hommage. Parmi les joueurs sur le terrain, un certain nombre ont été formé par ses soins, tel que le gardien Piet Velthuizen, et l’émotion est intense pendant cette minute d’applaudissement. Pour la petite histoire, le Vitesse s’impose 2-0 grâce à des buts de Havenaar et Bony. Ce dernier célèbre son geste en embrassant l’écusson du Vitesse sur son coeur, révélant un t-shirt à l’effigie de Theo Bos et en montrant le portait déposé dans le virage. Jan-Arie van der Heijden, qui portait jusque-là le numéro 4, le change par le 23 à l’occasion de ce match. Ce numéro sera ensuite retiré et plus aucun joueur du Vitesse ne l’a porté depuis. Le hasard veut qu’Utrecht a aussi retiré le numéro 4 suite au décès en 2005 du Français David di Tommaso d’une crise cardiaque après un match de son club.
L’histoire de Theo Bos a toujours été intriquée à celle du Vitesse. C’est donc au Gelredome que les fans, la famille, les amis et le club lui disent un dernier au revoir le 7 mars 2013. Son cercueil quitte le stade suite à une veillée funèbre sous les chants et les écharpes jaunes et noires brandies. Des fumigènes accompagnent son parcours sur la pelouse et devant les tribunes. Il est incinéré le lendemain et repose depuis au cimetière de Moscowa, à quelques encablures du quartier de Monnikenhuizen, là où son coeur a toujours résidé.
Depuis 2013, le match opposant le Vitesse et Utrecht au Gelredome se joue en partenariat avec la KWF, la ligue contre le cancer des Pays-Bas. Les fonds récoltés par la vente des maillots du match servent à la recherche contre le cancer du pancréas.


« Fernando Van den Driessche, jeune footballeur de dix-sept ans, a été retrouvé mort la nuit dernière dans sa chambre du centre d’entraînement du Vitesse. Attaquant de pointe, il était un des joueurs les plus prometteurs du football néerlandais. Sa mort dans l’enceinte de son club pose question. Une enquête a été diligentée par le parquet d’Arnhem pour connaître les causes de sa mort. Il se murmure dans les milieux spécialisés que le jeune talent aurait pu se suicider. »
Les premières informations sur le décès de Fernando ne tardèrent pas à sortir dans la presse spécialisée. L’affaire fit très rapidement les gros titres de la presse nationale et fit même parler dans la presse sportive internationale devant l’incongruité de l’affaire et la relative célébrité du mort. En effet, les premières constatations laissaient à penser que le jeune homme s’était tout simplement donné la mort. Les résultats de l’autopsie détrompèrent les premières impressions des enquêteurs.
"Van den Driessche ne s’est pas donné la mort. Il a succombé d’un étouffement ayant pour cause une alcoolisation massive. L’enquête s’oriente désormais sur un accident.
[…]
Plusieurs questions se posent : comment un mineur a pu sucomber alors qu’il n’y aurait jamais dû avoir d’alcool dans l’enceinte du club ? Qu’est-ce qui amène un jeune dont le talent était confirmé à avoir une hygiène de vie telle qu’il décède à cause d’un coma éthylique ? Quel rôle a l’encadrement dans cette mort ?"
Puis les choses finirent par se tasser. L’enquête suivait son cours, rien ne filtrait du côté de la justice et les médias passèrent rapidement à autre chose. Jusqu’à ce qu’un témoignage anonyme relance l’intérêt des journalistes.
"Un policier témoigne de la corruption entre le Vitesse et diverses institutions publiques dans l’affaire Van den Driessche.
[…]
Il s’avère que les problèmes psychologiques du prodige étaient largement connus dans l’entourage du club. Selon une source proche du dossier, Van den Driessche avait été arrêté près de vingt fois à cause d’ivresse sur la voie publique ou de bagarres et aucune poursuite n’a jamais été engagée contre lui. Pire, le Vitesse a couvert ses agissements et acheté le silence des victimes pour protéger sa future star.
[…]
Refusant les soins et l’accompagnement du club, le joueur a fini par être licencié et s’est tué quelques heures après l’avoir appris. La gestion de ce cas par le Vitesse interroge. Le club a protégé son joueur aux dépens du respect de la loi et l’a rejeté au moment où il aurait eu le plus besoin d’un suivi médical poussé.
[…]
Le procureur d’Arnhem, mis en cause par le policier témoin, n’a pas souhaité apporter de commentaire. La charge de l’enquête en cours lui a été retirée pour être confiée au parquet anti-corruption d’Amsterdam."
Cet article créa un emballement médiatique et mit le feu aux poudres. Le soufflé ne retomba plus et une nouvelle révélation tombait chaque jour. Le scandale était tel qu’il remonta jusqu’aux plus hautes instances du pouvoir néerlandais pour que la lumière soit faite sur cette affaire.
"Le procureur d’Arnhem inculpé pour concussion.
[…]
Il est désormais établi par la justice que des charges peuvent être retenues. L’ex-procureur d’Arnhem, qui avait démissionné il y a quelques jours, aurait touché des pots de vins sous forme d’avantages en nature lui permettant d’avoir accès à une loge au Gelredome à chaque soir de match tant qu’il taisait les méfaits de Van den Driessche. Il aurait aussi profité de vacances et de caisses de champagne offertes par le club.
[…]
Le premier ministre pointe du doigt une brebis galeuse dont les activités illégales rejaillissent négativement sur tout le processus judiciaire du pays. Il promet des réformes de fond pour que cela ne se reproduise plus."
Cette tempête entraina une vague d’indignation dans le milieu du football avec des demandes de sanction contre le Vitesse. Si la fédération se saisit du sujet, elle ne put prouver que cette affaire avait créé un avantage pour le club et clotura le dossier. Ce ne fut pas le cas de la justice qui chercha les responsables de cette calamiteuse gestion et les trouva.
"Au sein du Vitesse Arnhem, la tornade n’a pas fini de secouer l’institution. L’intendant, le directeur sportif adjoint en charge de la jeunesse et le directeur financier sont poursuivis pour corruption et ont été placés sous contrôle judiciaire en attente de leur procès. Ils ont, à eux trois, mis en place un pacte avec beaucoup d’acteurs locaux pour couvrir les actions négatives pour la réputation du club, dont les méfaits de Van den Driessche. Aucun lien n’a pu être fait avec d’autres acteurs du club selon le procureur d’Amsterdam.
[…]
Le Vitesse, en tant que personne morale, est lui aussi poursuivi pour le motif de corruption. Le président du club représentera le club au tribunal d’Amsterdam et s’attend à payer une amende salée. Le dirigeant a déjà provisionné plusieurs millions d’euros sur les comptes du club en prévision d’un jugement attendu dans ce sens.
[…]
Le quotidien sportif est compliqué à Papendal. Il se murmure qu’une bonne partie du staff et des joueurs sont atterés par le comportement des dirigeants et que certains menacent de quitter Arnhem pour ne pas être amalgamés à la conduite du club.
[…]
Les prochains jours seront décisifs dans l’actualité du club. Il peut tout aussi bien plonger et ne plus remonter à la surface comme profiter de ces jours sombres pour remettre tout à plat dans son fonctionnement."
Le seul qui buvait du petit lait dans tout ça était Fernando. Depuis sa nouvelle vie, il observait la situation se dégrader pour le Vitesse et cela le réjouissait au plus haut point. Comment aurait-il pu penser autrement ? Même s’il adorait ce club, c’était de sa faute et celle des dirigeants s’il était mort, maudit et réincarné en aigle.
Mais un soir, alors qu’il en riait à haute voix, Tupac, qui ne le lâchait pas d’une semelle depuis son arrivée, lui demanda :
« Pourquoi cela te fait-il rire ?
-Parce qu’ils l’ont bien mérité pardi !
-Tu ne penses pas que tu as ta part de responsabilité là -dedans ?
-Complètement, mais je pense que je suis assez maudit pour ne pas prendre sur mes épaules leurs erreurs.
-Vu comme ça… Mais ça ne te fait pas peur pour l’avenir du club ?
-Si… J’ai bien envie de le voir couler mais en même temps, ça reste quand même l’endroit où j’ai vécu le plus longtemps et un des rares où je n’étais pas maltraité en plus.
-Tu as vécu de chouettes moments ici, constata Tupac.
-Oui, c’est vrai.
-Ton âme est ici, mon garçon, c’st tangible. Il faut que tu prennes soin de ce lieu et c’est pour ça que tu es là .
-Pff, la bonne blague. S’il y a quelque chose de tangible ici, c’est juste mon cul plein de plumes !
-Rigole, mais tu changeras d’avis rapidement.
-Si tu le dis… »
