:STORYRED: :s15: 🇪🇷 :procida_calcio: Les Jumeaux de la Mer rouge

Les Jumeaux de la Mer rouge : Erythrée et Italie

1er mars 2023

L’ancienne colonie italienne de l’Érythrée est un pays compliqué. Après la Seconde Guerre mondiale et la défaite de l’Italie, l’ONU décide en 1952 d’annexer le pays à son voisin l’Ethiopie, elle-aussi ancienne colonie italienne. S’en suit pendant des années une guerre d’indépendance qui trouvera une issue qu’en 1991 par une victoire du Front Populaire de libération de l’Érythrée mené par Isaias Afwerki. Le pays est officiellement indépendant en 1993 et est alors dirigé par le chef révolutionnaire. La guerre entre l’Ethiopie et l’Érythrée a d’ailleurs continué jusqu’en 2018 avant qu’un traité de pays ne soit signé. Depuis le début des années 2000, l’Érythrée, toujours dirigée par Isaias Afwerki, adopte une attitude répressive et autoritaire, notamment via le service militaire à durée indéterminée (6,5 ans en moyenne), qui provoque un mouvement d’émigration (on estime à 300 000 le nombre de personnes qui ont quitté le pays en 10 ans) important et aboutit à plusieurs descriptions du pays comme une « prison à ciel ouvert ». De nombreux médias décrivent le pays comme un État gouverné par un régime totalitaire. Il n’existe pas réellement d’institution dans le pays et l’essentiel du pouvoir est concentré entre les mains de son président, Isaias Afwerki. L’Érythrée a souffert des sanctions draconiennes imposées par l’ONU en décembre 2009 et renforcées en décembre 2011.

Au niveau du football, le problème est le même que dans le reste du pays. Seuls quelques personnes ont tout pouvoir et la fédération, quoique toujours existante, n’a pu l’air de faire grand chose. On a aucune nouvelles de la tenue d’un championnat local et l’équipe nationale a été dissoute et ne participe plus à aucune compétitions internationales. Les autorités semblent vouloir garder la population érythréenne enfermée dans le territoire et a peur de l’évasion des sportifs. D’ailleurs, en octobre 2015, 10 membres de l’équipe ont reçu l’asile politique du Botswana et plus récemment, en 2019, sept joueurs érythréens ont disparu lors d’un match en Ouganda. Mohammed Saeid, qui joue actuellement en Suède, dit regretter ce choix, lui qui a pu découvrir l’équipe nationale avant son arrêt et espère qu’un jour d’autres joueurs locaux pourront découvrir le plaisir de défendre sa patrie. Même si ça semble compromis qu’il y ait une équipe qui se présente aux qualifications pour la Coupe du Monde 2026…

28 septembre 2016

Dans les années nonante, Riace est un petit village perdu du Sud de l’Italie, loin de tout, sans grand intérêt. Il s’est complètement dépeuplé. Jusqu’à ce qu’en 1998, un bateau s’échoue sur la plage toute proche, avec 300 migrants kurdes à bord. le clergé propose d’utiliser le local paroissial pour les héberger, et confie au jeune Domenico Lucano l’organisation de l’aide. Celui-ci se demande si ce n’est pas une incroyable opportunité pour sauver le village. Et si on mettait à leur disposition les nombreuses maisons vides ? Et si le village renaissait de ses cendres ?

Et c’est exactement ce qui se produit. L’économie reprend à travers de nombreux projets très locaux. Domenico Lucano est élu maire trois fois de suite ! En vingt ans, plus de 6000 réfugiés passent par Riace. La population de 900 habitants monte à 2100, dont 400 demandeurs d’asile ou réfugiés de toutes origines. Le modèle est largement subventionné, mais coûte bien moins cher à l’Etat que l’accueil classique des migrants. Et surtout, le village revit. Les habitants se retrouvent dans des ateliers de verrerie, de broderie, de céramique, de tissage. L’école est rouverte. L’ambiance est sereine.

Mais l’Italie connait depuis plusieurs annĂ©es une montĂ©e de populisme. Et pour un Matteo Salvini, prĂ©sident de la Lega, parti d’extrĂŞme-droite, devenu ministre de l’IntĂ©rieur en 2018, le modèle « Riace Â» est un modèle Ă  abattre. A peine arrivĂ© au pouvoir, sa cible est Domenico Lucano, le maire du village. Et quatre mois plus tard, celui-ci est arrĂŞtĂ©, accusĂ© de favoriser l’immigration clandestine.

Les habitants sont sidérés. Du jour au lendemain, les aides structurelles sont coupées, les accueillants perdent leur travail, et le village se vide. Les symboles d’hospitalité sont effacés. L’école est fermée. Le village se retrouve face à un choix : résister ou disparaitre.

A suivre…


11 « J'aime »