Réponses aux lecteurs
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@Manthyz les restaurateurs ont fait leur choix en tout cas ![]()
Les pierres dorées du centre historique, usées par les siècles, ont retrouvé un parfum d’embruns mêlé de saudade et de renouveau. Sur les quais, face à l’océan Atlantique, un petit établissement vient d’ouvrir ses portes. La devanture est modeste, mais elle attire déjà l’œil par la chaleur qu’elle dégage. Un mot peint à la main en lettres élégantes y trône : « O Coração de Viana ». Les habitués de Wrexham, eux, n’y verront qu’un seul nom : le Cantinho. Et comprendront qu’ici, l’exil s’achève — et qu’une histoire reprend vie.
Le destin du Cantinho aurait pu s’arrêter dans les cendres d’un soir d’hiver. Restaurant familial apprécié de la communauté portugaise de Wrexham depuis deux décennies, le lieu avait été la cible d’un incendie d’origine criminelle. Si les auteurs n’ont pas été formellement identifiés, beaucoup ont vu dans cet acte une conséquence collatérale du climat tendu entre le SC Vianense et le club gallois. Le feu, cette fois, ne provenait pas du terrain. Il consumait des murs, des souvenirs, des liens. Il détruisait.
Mais il ne brisait pas tout.
Car après les larmes, après l’incrédulité, le couple à l’origine du Cantinho — José et Catarina Monteiro — a pris une décision. Celle de rentrer. De revenir au pays. De poser à nouveau leurs valises dans une ville qu’ils avaient quittée jeunes et amoureux, et qu’ils retrouvaient aujourd’hui forts de vingt années de lutte, de sueur, d’amour partagé derrière un comptoir.
À Viana do Castelo, l’accueil fut immédiat. Chaleureux. Presque organique. En quelques jours, les voisins, les commerçants, les fidèles de Vianense eux-mêmes leur témoignèrent un soutien inattendu, presque intime. Le club se manifesta. Des figures locales proposèrent un local. Et le président Barshim, personnellement, facilita les démarches pour la relance de leur activité. Le couple refusa poliment l’aide financière que Wrexham avait offerte pour rebâtir à l’identique. Ils préférèrent rebâtir ailleurs. Rebâtir autrement.
« Ce n’est pas une fuite, c’est une renaissance, » déclara José Monteiro à la presse régionale.
« Nous avons passé vingt ans à Wrexham, vingt années dignes, pleines, mais le feu a été un signal. Nos enfants vivent à Braga, nous voulions les retrouver, nous voulions retrouver la mer. »
Catarina, plus émue, ajouta : « Ce qui nous a le plus touché, ce n’est pas le feu. Ce sont les mains tendues ici. À Viana. Ce sentiment d’appartenance immédiat. Ce n’est pas notre ville natale, mais c’est notre nouvelle maison. »
Et dans ce nouveau “Cantinho”, où l’on sert déjà du bacalhau com natas à côté d’un lamb cawl gallois revisité, tout respire l’hybride assumé, le pont entre deux cultures. Sur un mur, une photo encadrée de Wrexham côtoie une écharpe du SC Vianense. Et au-dessus du bar, une inscription gravée dans le bois :
“À ceux qui tombent et se relèvent, une table sera toujours dressée.”
Ainsi va la vie, ainsi va le football, ainsi va Viana.
Le Cantinho brûla, mais ne s’éteignit jamais. Il changea simplement de rive.
