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Miles Jacobson, directeur du studio, parle de la refonte complète de Football Manager 26.
Lors du Tokyo Game Show 2025, nous avons rencontré Miles Jacobson, directeur du studio Sports Interactive, pour une conversation approfondie sur Football Manager 26. La discussion a porté sur l’annulation de FM25, la refonte complète des systèmes du jeu et l’ajout du football féminin à la série.
Tirer les leçons de l’échec et prendre un nouveau départ
Jacobson a abordé directement l’annulation de FM25, la qualifiant d’« échec ».
« Je suis en paix avec cela », a-t-il déclaré. « Je m’excuse auprès de tous ceux qui attendaient le jeu l’année dernière, mais j’ai dû accepter le fait que nous avions créé un jeu qui n’était pas assez bon, et je l’ai annulé. »
Il a expliqué que les jeux sont chers par rapport aux salaires dans de nombreux pays asiatiques, et qu’il ne pouvait pas demander aux joueurs d’économiser pendant des mois pour finalement recevoir un produit de qualité médiocre.
L’annulation du jeu a été une leçon pour l’équipe.
« Nous avons appris que nous étions trop ambitieux dans ce que nous essayions de faire. Nous avons appris que certaines idées peuvent sembler excellentes et paraître bonnes sur le papier, mais ne fonctionnent pas dans la réalité », a déclaré Jacobson.
Il a comparé cela au football lui-même, en faisant référence au talent naturel par opposition au travail acharné :
« Vous pouvez avoir tout le talent du monde, mais si vous ne travaillez pas à 100 % chaque jour, à quoi sert d’avoir ce talent ? »
Jacobson a souligné que Football Manager 26 n’est pas le prochain opus de la série.
« Les gens ne doivent pas considérer FM26 comme la prochaine version de la série. Il s’agit de la première version des 20 prochaines années », a-t-il déclaré.
L’équipe a évalué ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas.
« Nous avons commencé par examiner ce qui, selon nous, fonctionnait très bien dans le jeu et ce qui, selon nous, ne fonctionnait pas bien. Et ce qui ne fonctionnait pas bien dans le jeu, nous l’avons soit amélioré, soit supprimé », a expliqué Jacobson.
La question qu’ils se sont posée était la suivante : s’ils pouvaient recommencer à zéro, feraient-ils les choses de la même manière ?
La réponse était souvent non, ce qui a conduit à des changements tels que la refonte complète du système tactique afin de séparer le jeu en possession et hors possession avec des formations différentes pour chaque état.
Équilibre entre accessibilité et profondeur dans Football Manager 26
Football Manager 26 devait fonctionner aussi bien pour les nouveaux venus que pour les fans inconditionnels. Les chiffres ont révélé un défi : FM24 comptait 20 millions de joueurs, contre seulement 2 millions en 2021, mais de nombreux nouveaux venus abandonnaient après une heure.
« Environ 8 millions de personnes continuent à jouer pendant 5 heures. Et si vous jouez à Football Manager pendant 5 heures, vous jouez pendant 100 heures », a fait remarquer Jacobson.
L’équipe a créé une équipe dédiée à l’accessibilité et a fait appel à des personnes qui souhaitaient créer une expérience plus légère.
« Je ne serais pas la personne la plus indiquée pour travailler sur ce projet, car je connais très bien le jeu », a admis Jacobson.
La nouvelle interface utilisateur présente les informations par petits morceaux tout en masquant leur complexité jusqu’à ce que les joueurs souhaitent approfondir leurs connaissances. Il existe également FMpedia, une encyclopédie footballistique intégrée au jeu qui explique les concepts et dirige les joueurs vers les écrans pertinents. L’équipe de développement a créé six personnages différents et a équilibré leurs caractéristiques.
« Cela représente désormais une part importante du processus, car notre studio s’est développé et nous avons davantage de joueurs », explique Jacobson.
Le défi de la nouvelle interface
La refonte de l’interface utilisateur a rencontré des complications. La première version ne fonctionnait pas, ce qui a contribué à l’annulation de FM25.
« Nous avons essayé d’être trop malins avec le système. Nous avons essayé d’avoir un seul système de navigation, mais cela n’a pas fonctionné », explique Jacobson.
L’équipe a créé trois systèmes de navigation différents : menu principal, sous-menu et signets.
« Avec la nouvelle interface, nous pouvons afficher plus d’informations à l’écran, mais sous forme de petits blocs. Vous obtenez ainsi les informations clés dans les encadrés et si vous souhaitez approfondir et en savoir plus, il vous suffit de cliquer dessus », explique-t-il.
La réaction a été différente selon les joueurs : les nouveaux utilisateurs trouvent cela plus facile, tandis que les joueurs chevronnés ont du mal à changer leurs habitudes.
« Pour les utilisateurs chevronnés, comme ils sont habitués à ce que tout soit à un certain endroit, tout a changé. Il faut oublier ses habitudes et réapprendre, mais une fois qu’on a réappris, c’est beaucoup plus facile à utiliser », a déclaré Jacobson.
Football féminin : briser le plafond de verre
L’ajout du football féminin a pris du temps, et Jacobson l’a reconnu :
« Tout d’abord, je m’excuse que cela ait pris autant de temps. Cela aurait dû être fait plus tôt. »
Le processus a commencé avec l’embauche de Tina Keech, qui avait travaillé sur les cotes de paris pour Matthew Benham, de Brentford. Elle a mis en place un réseau de recherche mondial, composé en grande partie de membres de l’équipe de recherche existante sur le football masculin qui souhaitaient également contribuer au football féminin. (ils parlent des assistants de recherche, @Akasha est l’AR du Stade de Reims masculin et @Groot du LOSC masculin par exemple)
Jacobson a passé du temps à apprendre auprès de personnes impliquées dans le football féminin, notamment Emma Hayes, aujourd’hui entraîneuse de l’équipe nationale féminine américaine.
« En une heure, elle m’a appris plus sur le cycle menstruel que je n’ai appris en vivant avec des femmes pendant 53 ans et sur les effets que cela a », a-t-il déclaré.
L’équipe a décidé comment représenter les joueurs.
« Nous avons estimé que ce n’était pas juste, car les hommes ont tendance à être plus forts que les femmes. Les femmes ont généralement une meilleure agilité que les hommes », explique Jacobson.
Ils comparent les femmes entre elles et les hommes entre eux pour les attributs de performance, tandis que les attributs d’entraînement utilisent la même échelle.
Le travail graphique a nécessité de refaire toute la capture de mouvement.
« La morphologie des femmes est différente de celle des hommes. Les femmes ont généralement des hanches plus larges, car elles sont capables de donner naissance, ce qu’aucun homme ne peut faire », a fait remarquer Jacobson. Cela a nécessité des milliers d’animations.
Football Manager 26 est lancé avec 11 ligues féminines réparties sur 14 divisions (sous licence).
« C’est plus que n’importe quel autre jeu de sport. C’est aussi plus que la plupart des jeux de sport proposent pour le football masculin », a déclaré Jacobson.
L’objectif est d’égaler les 53 ligues professionnelles existantes pour le football masculin.
« Nous voulons qu’il y ait 53 ligues professionnelles dans le football féminin », a-t-il déclaré.
Réalité du marché des transferts
Interrogé sur le réalisme du marché des transferts, Jacobson a rejeté les critiques.
« Je ne pense pas que notre marché des transferts soit irréaliste. Je pense que les gens ne comprennent pas nécessairement comment cela fonctionne dans la vie réelle », a-t-il déclaré.
Il a cité des exemples concrets : Newcastle a payé 67 millions de livres sterling pour Nick Woltemade parce que son club exigeait plus que la valeur marchande, ou Aston Villa a obtenu un bon prix pour Jadon Sancho parce que Manchester United devait respecter les règles du fair-play financier.
« Le prix de transfert d’un joueur est déterminé par la valeur de ce joueur pour son équipe », a expliqué Jacobson.
Son conseil était de négocier.
« Si vous allez acheter une voiture et que vous voulez acheter une voiture d’occasion, payez-vous le prix indiqué sur le pare-brise ou essayez-vous de négocier ce prix à la baisse ? Alors, pourquoi ne faites-vous pas de même dans Football Manager ? »
Gegenpress et variété tactique
La tactique du Gegenpress est considérée comme très efficace dans Football Manager. Jacobson n’a pas nié sa puissance, mais a nuancé son propos.
« Si vous avez de très bons joueurs, cela fonctionne bien. Si vous n’avez pas de très bons joueurs, ceux-ci se fatiguent plus vite. Et c’est clairement un élément qui est pris en compte dans le jeu », a-t-il déclaré.
Il a cité des exemples concrets de petites équipes comme Brighton et Getafe qui utilisent leurs propres systèmes.
« Personne en Liga ne veut jouer contre Getafe. Personne ne veut les affronter. Parce qu’ils savent qu’ils ne participent pas à un match de football, mais à un combat », a fait remarquer Jacobson.
Son approche tactique varie selon les équipes. À la tête de Watford, il joue en 4-3-3 en possession du ballon et en 4-5-1 hors possession, avec un pressing adapté au niveau physique de ses joueurs.
« Pour moi, le milieu défensif est le poste le plus important sur le terrain », ajoute-t-il.
« Il n’y a pas de tactique idéale. Il faut l’adapter en fonction des joueurs. »
Améliorations techniques dans Football Manager 26
Football Manager 26 comprend des améliorations techniques. L’équipe s’est associée à Unity pour améliorer les graphismes, à Transfer Room (qui gère les transferts comme les clubs réels) et à Hawkeye Technologies, qui fournit des données VAR dans le monde entier.
« Ils ont 18 caméras dans chaque stade de football. Et il se trouve qu’ils suivent le même nombre d’os que nous avec la capture de mouvement », a expliqué Jacobson.
Ces données volumétriques signifient que lorsque les joueurs lèvent les yeux avant de centrer ou effectuent des touches spécifiques, cela est basé sur des données footballistiques réelles.
L’IA a bénéficié de milliers d’améliorations, notamment en matière de jeu défensif et de marquage.
« Les gens se concentrent toujours sur l’aspect offensif. Ce dont je suis le plus fier, c’est la façon dont nous avons amélioré le marquage et l’aspect défensif du jeu », a déclaré Jacobson.
L’équipe a également fait appel à un ancien développeur de Forza Motorsport pour diriger l’équipe artistique.
Le partenariat avec la Premier League et la stratégie mobile
Après 20 ans de discussions, Football Manager a obtenu une licence de la Premier League. Le timing était parfait, car la structure de l’accord d’EA le permettait.
« Ils se sont en quelque sorte tournés vers la Premier League et ont dit : « Écoutez, nous voulons toujours être le partenaire numéro un, mais si vous voulez conclure un accord avec Football Manager, ça nous va » », se souvient Jacobson.
Le partenariat met l’accent sur l’authenticité. Cela signifie inclure les logos EA FC tels qu’ils apparaissent dans les retransmissions réelles, utiliser la même police de caractères et le même tableau d’affichage, et reproduire les sorties des joueurs.
« Lorsque vous regardez les matchs, vous avez l’impression de regarder une retransmission internationale », explique Jacobson.
Il a souligné qu’il n’y avait aucun problème de concurrence :
« N’est-ce pas un problème pour vous de promouvoir leur jeu ? Non, cela ne nous pose aucun problème. Ils ont payé pour être présents et chaque match devrait en bénéficier. »
Football Manager Mobile est désormais une exclusivité Netflix, une décision qui trouve son origine dans une stratégie mise en place il y a neuf ans. L’expérience de Jacobson dans l’industrie musicale a influencé sa façon de penser. Dans les années 1990, il a alerté son entreprise sur le partage de musique entre étudiants universitaires via des serveurs.
« J’ai envoyé un fax au directeur juridique de l’entreprise pour laquelle je travaillais, lui disant que nous devions nous occuper de ce problème immédiatement et mettre en place un cadre de licences, sinon nous allions perdre », se souvient-il. L’avocat lui a répondu qu’Internet ne ferait pas long feu.
L’adoption du streaming a fait passer le nombre de joueurs de FM de 2 millions à 20 millions.
« Cela ne signifie pas que les revenus ont été multipliés par dix. Ils ont été multipliés par environ deux fois et demie », explique Jacobson.
Netflix a permis à Football Manager Mobile de continuer à exister alors qu’il était sur le point d’être abandonné en raison d’un nombre insuffisant de joueurs.
« Netflix est intervenu et a dit : « Ne faites pas ça. Nous allons maintenir ce jeu en vie » », a déclaré Jacobson. La version mobile proposera pour la première fois la langue indonésienne, et il est prévu de l’ajouter à la version PC si elle est bien accueillie.
Configuration requise et modding
Malgré les améliorations graphiques, Sports Interactive a gardé à l’esprit l’accessibilité.
« Nous ne prenons plus en charge les ordinateurs portables vieux de 17 ans. Nous prenons désormais en charge les ordinateurs portables vieux de 10 ans. Quels autres jeux font cela lorsque de nouvelles fonctionnalités apparaissent ? », a demandé Jacobson.
Le modding reste pris en charge, même si certaines fonctionnalités ne seront pas disponibles au lancement. Les packs de joueurs et les packs de logos fonctionnent, mais les skins personnalisés ne seront pas disponibles dans Football Manager 26 au départ. La configuration de l’écran ne sera pas non plus disponible au lancement, mais pourrait l’être dans de futures mises à jour.
L’équipe modifie sa terminologie : les correctifs permettront de résoudre les problèmes, tandis que les mises à jour de contenu pourront ajouter de nouveaux modes ou fonctionnalités.
« Il sera très intéressant de voir ce qui se passera tout au long de ce cycle », a déclaré Jacobson.
La vision d’avenir après Football Manager 26
Interrogé sur la vision globale, Jacobson a répondu sans détour :
« Il s’agit de créer le jeu de gestion footballistique le plus réaliste et le plus accessible qui ait jamais existé. Ces deux objectifs sont complètement contradictoires, mais je pense que nous y sommes parvenus. »
Il considère Football Manager 26 comme une base.
« Si c’est la première version de ce que nous faisons avec le nouveau moteur, imaginez ce que ce sera dans cinq ans », a-t-il déclaré.
À 53 ans, Jacobson réfléchit à sa succession.
« Je prépare l’avenir, car je ne serai probablement plus là dans 20 ans. Je vieillis », a-t-il fait remarquer.
La structure de l’équipe est conçue pour permettre à d’autres de poursuivre le travail dans les années à venir.
L’interview s’est terminée par des félicitations à l’Indonésie pour avoir remporté la Coupe du monde de Football Manager et par des informations sur la prise en charge de la langue indonésienne. La conclusion de Jacobson résume bien sa philosophie :
« Nous ne créons pas un jeu, nous créons un monde. Nous créons un monde du football, où vous pouvez faire tout ce que vous voulez. »
