Le ciel au dessus de Berlin est d’un gris uniforme, celui des matins où la ville semble hésiter entre la mélancolie et l’espoir. À l’entrée du centre d’entraînement du Hertha BSC, à Schenchendorffplatz, quelques journalistes patientent, encore incrédules. La veille, le club a officialisé une nouvelle qui a fait trembler le football allemand :
« Un gamin », a soufflé un ancien dirigeant sur les ondes de la RBB.
« Un symbole », répondent déjà les supporters, plus émus que sceptiques.
Un enfant de Berlin Ă la tĂŞte de la Vieille Dame
Krüger arrive sans escorte, un sac sur l’épaule, l’air concentré, le pas rapide.
On le reconnait immédiatement : cheveux foncés, regard franc, presque trop jeune pour porter un survêtement siglé Coach. Mais à Berlin, on aime les histoires d’enfants du pays. Et celle-ci a le parfum d’un conte moderne.
Né à Prenzlauer Berg, Jens Krüger est un pur produit berlinois. Ancien joueur du centre de formation du Hertha, Jens a grandi dans les tribunes de l’Olympiastadion. « J’avais douze ans quand Pantelic marquait encore pour nous, se souvient-il. J’étais persuadé qu’on allait redevenir un grand club européen. Et puis… tout s’est arrêté. »
Le Hertha n’a jamais vraiment sur transformer ses promesses en triomphe. Deux titres de champion, dans les années 1930, puis plus rien. Des montées, des descentes, des projets avortés.
La capitale allemande, coeur politique et culturel du pays, n’a jamais su s’imposer comme un bastion du football. « Berlin a toujours eu des rêves trop grands pour ses propres terrains », écrivait jadis un chroniqueur local.
Le Hertha BSC sombre petit Ă petit
Les dernières saisons ont laissé des cicatrices.
En 2022/23, le club sombre en Bundesliga : dernier, relégué, humilié.
Un an plus tard, en 2. Bundesliga, la reconstruction patine : 9ème place, un jeu hésitant, des tribunes à moitié pleine et une identité perdue.
Berlin ne vibre plus.
La saison 2024/25 devait marquer le sursaut.
Mais, encore une fois, malgré quelques promesses, le Hertha termine 11ème, et est éliminé dès le 2éme tour de la DFB Polka.
L’équipe se cherche, le public doute et la flamme semble vaciller encore un peu plus.
« Ce club s’était éteint, » confie un ancien du vestiaire.
« On ne savait plus qui on était. »
Longtemps critiquée pour son instabilité et ses paris manqués, la direction du Hertha choisit enfin une voie radicale : tout remettre à plat, tout reconstruire, et confier les clés à un enfant du club, symbole d’un renouveau ancré dans l’identité berlinoise.
Un discours qui claque comme une gifle
Le 21 juillet 2025, à 14 h 06, dans la salle de presse du centre d’entraînement, Jens Krüger prononce ses premiers mots d’entraîneur.
Calme. Direct.
Les caméras se lèvent, les sourcils se froncent. Révolution ? À 22 ans ?
Mais le ton est assuré. Il poursuit :
L’effet est immédiat. Sur les réseaux sociaux, les fans partagent son discours comme une déclaration de guerre.
Les sceptiques ironisent : « Il va surtout révolutionner la jeunesse ! »
Mais Krüger ne bronche pas. Il a préparé cette journée depuis des mois.
Le vestiaire écoute, à la fois débousolé et intrigué
Le premier entraînement, le 21 juillet à 17 h, a été bref, intense, presque solennel.
Une heure et demie de travail, peu de mots, beaucoup de regards. Il ne s’agit pas encore de tactique, mais de culture.
Chaque joueur reçoit une feuille, simple :
Un geste presque naĂŻf, mais symbolique.
« Il veut nous reconnecter à ce qu’on représente, » glisse un cadre de l’équipe.
« Ce n’est pas juste du foot, c’est une identité. »
La Vieille Dame s’éveille, l’espoir reprend ses couleurs
Berlin se réveille.
Dans les rues de Charlottenburg, les drapeaux bleu et blanc réapparaissent aux fenêtres. Sur les forums de supporters, on s’échange déjà les photos du jeune coach, téléphone à la main, discutant avec les fans à la sortie du centre. L’excitation, timide au départ, devient contagieuse.
Certains y voient la folie d’un club à bout de souffle. D’autres, la seule voie possible.
Le Hertha BSC a tout tenté, les millions, les investisseurs, les entraîneurs d’expérience. Rien n’a fonctionné.
Alors pourquoi pas l’audace ?
Le pari de la jeunesse.
Le Hertha ne promet pas de miracles.
Mais Jens KrĂĽger a promis du sens.
Et parfois, c’est tout ce dont un club a besoin pour renaître.
« On dit souvent que Berlin ne dort jamais.Il est temps que son football se réveille. »
Dans les bureaux du club, les mots circulent comme un mantra.
Dans les tribunes, on rêve déjà du retour de la Vieille Dame parmi les grandes d’Europe.
La révolution, elle, vient tout juste de commencer.





































